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L’objectif principal du colloque réside ainsi dans le questionnement de la manière dont l’ignorance influence la recherche dans les différentes disciplines scientifiques (aussi bien en recherche fondamentale qu’en recherche appliquée). Les propositions de communication doivent contribuer à une enquête philosophique et épistémologique sur l’ignorance — ou les ignorances — dans les sciences. L’ambition est donc autant d’interroger le contenu philosophique des pratiques scientifiques que d’utiliser ces dernières pour construire une définition de l’ignorance ou encore mettre à l’épreuve les conceptualisations actuelles. L’ambition globale est d’obtenir une conception de l’ignorance éclairée et informée tout autant par ses compréhensions philosophiques que par ses manifestations dans les pratiques scientifiques.

Informations pratiques

Le programme ainsi que le livre des résumés provisoire sont dorénavant accessible dans les onglets dédiés du site.

Le colloque se déroulera en présentiel à la Salle de la Rotonde, au 18 rue Chevreul, à Lyon. Si vous souhaitez y assister présentiel, l'inscription gratuite mais obligatoire (pour raisons logistiques liées au buffet) se fait par le formulaire présent à gauche sur ce site (onglet "Inscription").

Si vous souhaitez suivre le séminaire en ligne, cela sera possible au lien suivant https://univlyon3.webex.com/univlyon3/j.php?MTID=m02e26844eb03c6a030e5e1e67a0ba77d

Argumentaire

L’ignorance, à la fois en tant que concept et état, a reçu très peu d’attention académique jusqu’aux années 1980. Cela s’explique par sa conception même — alors perçue comme directement opposée au savoir et à la connaissance — qui la rend indésirable. En tant qu’absence, l’ignorance n’aurait pas de nature propre et ne présenterait donc pas d’intérêt académique particulier. En tant qu’absence, surtout, elle est difficile à identifier et à saisir. L’émergence de controverses scientifiques comme la controverse du tabac ou bien celle autour de la déplétion de la couche d’ozone dans les années 1960 rend l’ignorance visible par ses conséquences environnementales et sur la santé publique. Cette mise en lumière de l’ignorance donne lieu au développement de ce que Gross and McGoey (2015) appellent aujourd’hui les ignorance studies, c’est-à-dire les études de l’ignorance au sens large, regroupant plusieurs disciplines : philosophie, linguistique, sociologie, histoire, économie, etc. Parmi ces études, nous pouvons citer l’agnotologie (Proctor, 1995; Proctor and Schiebinger, 2008), la sociologie de l’ignorance scientifique (Stocking, 1998) et l’épistémologie féministe de l’ignorance (Tuana, 2004, 2006). Ces approches s’attachent particulièrement à la dimension sociale de l’ignorance à la fois dans ses sources et dans ses conséquences, et soulignent de ce fait l’omniprésence et la pluralité de l’ignorance en sciences.

Elles ont cependant un angle mort, lié à la concentration sur le phénomène plutôt que sur le concept : l’ignorance n’a pas de définition et ses conditions sont encore inconnues, donc ses influences sur la recherche même, d’un point de vue épistémique, ne sont pas connues. De nouvelles approches se sont développées depuis les années 2010, s’attachant à étudier cet aspect de l’ignorance. D’abord, nous trouvons ce que nous appelons l’heuristique de l’ignorance (voir Firestein, 2012; Ivainer and Lenglet, 1996; Gaudet, 2014), c’est-à-dire l’étude du rôle de l’ignorance dans la recherche d’un point de vue heuristique : quel est le rôle de l’ignorance dans la dynamique de découverte et d’innovation scientifique ? Dans quelle mesure est-elle une ressource ou un moteur pour la recherche ? Ensuite, des travaux en épistémologie analytique se sont développés en parallèle, en particulier ceux de Le Morvan (2011, 2013, 2015, 2022) et Peels (2009, 2011, 2012, 2023), qui s’attachent à définir les conditions nécessaires et suffisantes de l’ignorance, à déterminer ses propriétés et interroger sa pluralité. Cette variété d’études nous mène à penser que l’ignorance se trouve bien au cœur de la recherche scientifique, et ce dans toutes les disciplines. Mais est-elle traitée et prise en compte de la même manière en physique et en géologie ? A-t-elle une influence similaire en mathématiques et en biologie ? Si l’épistémologie analytique nous permet de poser un cadre général pour analyser le concept, le définir ne peut se faire indépendamment des situations concrètes dans lesquelles l’ignorance s’inscrit. Nous proposons donc d’explorer l’ignorance, à la fois comme concept et comme phénomène, à partir des pratiques scientifiques elles-mêmes. Les pistes suivantes, entre autres, pourront être explorées :
• Pourquoi définir l’ignorance ? Quels sont les enjeux et difficultés de ce travail de définition ?
• Quelles sont les conditions et les propriétés de l’ignorance ?
• Comment les ignorances sont-elles représentées dans les sciences ?
• À quelles ignorances les scientifiques font-ils face dans leurs disciplines aujourd’hui ?
• Les ignorances actuelles sont-elles en principe dépassables ?
• Comment les ignorances scientifiques évoluent-elles ?
• Quelles sont les stratégies mises en place par les scientifiques pour traiter l’ignorance ?


L’objectif principal du colloque réside ainsi dans le questionnement de la manière dont l’ignorance influence la recherche dans les différentes disciplines scientifiques (aussi bien en recherche fondamentale qu’enrecherche appliquée). Les propositions de communication doivent contribuer à une enquête philosophique et épistémologique sur l’ignorance — ou les ignorances — dans les sciences. L’ambition est donc autant d’interroger le contenu philosophique des pratiques scientifiques que d’utiliser ces  dernières pour construire une définition de l’ignorance ou encore mettre à l’épreuve les conceptualisations actuelles. L’ambition globale est d’obtenir une conception de l’ignorance éclairée et informée tout autant par ses compréhensions philosophiques que par ses manifestations dans les pratiques scientifiques.

Bibliographie :
Stuart Firestein. Ignorance: How it Drives Science. Oxford University Press, New York, 2012.
Joanne Gaudet. Absence and Presence in Science: Critical Reply to the Special Issue on ‘Absences’. Social Epistemology Review and Reply Collective, 3(4):16–23, 2014.
Matthias Gross and Linsey McGoey, editors. Routledge Handbook of Ignorance Studies. Routledge International Handbooks. Routledge, Abingdon, Oxon ; New York, NY, second edition edition, 2015.
Théodore Ivainer and Roger Lenglet. Les ignorances des savants. Maisonneuve et Larose, Paris, 1996.
Pierre Le Morvan. Knowledge, Ignorance and True Belief. Theoria, 77(1):32–41, 2011.
Pierre Le Morvan. Why the Standard View of Ignorance Prevails. Philosophia, 41(1):239–256, March 2013.
Pierre Le Morvan. On the ignorance, knowledge, and nature of propositions. Synthese, 192(11):3647–3662, 2015. Publisher: Springer.
Pierre Le Morvan. Ignorance, truth, and falsehood. Ratio, 35(3):169–180, September 2022.
Rik Peels. What Is Ignorance? Philosophia, 38(1):57, 2009.
Rik Peels. Ignorance is Lack of True Belief: A Rejoinder to Le Morvan. Philosophia, 39(2):345, 2011.
Rik Peels. The New View on Ignorance Undefeated. Philosophia, 40(4):741–750, December 2012.
Rik Peels. Ignorance: A Philosophical Study. Oxford University Press, March 2023.
Robert Proctor and Londa Schiebinger, editors. Agnotology: The Making and Unmaking of Ignorance. Stanford University Press, Stanford, 2008.
Robert N. Proctor. The Cancer Wars: How Politics Shapes What We Know And Don’t Know About Cancer. Basic Books, New York, NY, March 1995.
Holly Stocking. On Drawing Attention to Ignorance. Science Communication, 20(1):165–178, September 1998. Publisher: SAGE Publications Inc.
Nancy Tuana. Coming to Understand: Orgasm and the Epistemology of Ignorance. Hypatia, 19(1): 194–232, 2004.
Nancy Tuana. The Speculum of Ignorance: The Women’s Health Movement and Epistemologies of Ignorance. Hypatia, 21(3):1–19, 2006.

Participation

Date limite d’envoi des propositions : 01/12/2023 (AoE)
Format : 500 mots (hors bibliographie - celle-ci doit être mise dans le champ "Commentaires" si nécessaire)
Langue : français ou anglais
Les communications auront une durée de 30 minutes, suivies d’un temps d’échange de 15 minutes.
Les participant(e)s retenu(e)s seront contacté(e)s courant janvier 2024.

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